Ce 18 avril, c’est la Journée Européenne des Droits du Patient. L’occasion de présenter un métier parfois méconnu au sein de nos hôpitaux : le médiateur hospitalier. Son rôle ? Désamorcer des situations conflictuelles et restaurer la confiance entre patient et prestataire de soins. Au sein des hôpitaux du Groupe Jolimont, ce sont deux médiatrices, Christine DUTRIEUX et Julie VANDERELST, qui relèvent cette fonction avec grand enthousiasme !
Que représente la fonction de médiateur au sein d’un hôpital ?
Christine DUTRIEUX : C’est d’abord être à l’écoute des patients qui veulent exprimer un mécontentement par rapport à leur prise en charge. Notre fonction trouve son origine dans le cadre de la loi sur les droits du patient de 2002. Le médiateur doit comprendre les besoins du patient insatisfait et tenter de clarifier ses attentes. Dans un premier temps, nous récoltons les informations nécessaires auprès du service ou du prestataire de soins impliqué. Ensuite, nous revenons vers le patient de manière directe avec une rencontre, ou indirecte, par mail, courrier ou téléphone afin d’apporter des éléments de réponse à sa plainte. La médiation est un processus volontaire, et les professionnels de la santé ont le choix d’y adhérer ou non, ce qui reste très rare. La volonté du groupe hospitalier est de favoriser une collaboration avec le service de Médiation.
Julie VANDERELST : Le rôle du médiateur est de favoriser et de promouvoir le dialogue. Nous essayons de restaurer le contact entre le patient et le prestataire. Nous intervenons uniquement lorsqu’il y a une rupture. Nous jouons alors le rôle d’intermédiaire entre les deux parties toujours dans l’optique d’apporter des informations et des explications. Il s’agit souvent de problèmes de communication, d’où l’importance de pouvoir se mettre ensemble autour de la table.
Votre objectif est donc de désamorcer des conflits et de rétablir une communication plus sereine…
Julie VANDERELST : Oui, parfois, ce que le patient a compris des explications du prestataire de soins est bien différent de ce que le prestataire a voulu dire. Cela crée des conflits et des incompréhensions. C’est très important de pouvoir clarifier la situation.
Christine DUTRIEUX : Effectivement, nous nous rendons compte que beaucoup de plaintes sont souvent liées à des problèmes de communication, à un manque de clarté, ou encore à un manque de respect et d’empathie ressenti de la part du patient. L’objectif de la plainte est également que chacun puisse, si nécessaire, se remettre en question dans ses actes et son comportement Souvent les patients veulent témoigner pour éviter qu’un souci ne se reproduise pour une autre personne. Nous sommes dans une optique d’amélioration continue. C’est là que notre métier revêt une facette très positive. Nous sommes amenées, dans nos rapports d’activités, à émettre des recommandations et des suggestions d’amélioration. L’objectif de la médiation est avant tout de restaurer un dialogue et contribue d’une certaine façon à améliorer la qualité des prestations de santé. C’est une relation gagnant-gagnant. C’est important de voir la médiation de manière positive. Elle permet à chacun de s’exprimer et de se mettre à la place de l’autre pour mieux le comprendre. Toute plainte permet une amélioration potentielle.
Dans quels cas le patient peut-il vous contacter ?
Julie VANDERELST : C’est assez vaste. Cela concerne principalement les plaintes liées aux droits du patient. Le patient peut nous contacter s’il est insatisfait du soin dispensé ou si le cadre relationnel avec le soignant est altéré. La relation de confiance entre le patient et le prestataire est fondamentale. A noter, nous ne nous occupons pas des contestations de factures qui concernent le service contentieux.
Quel est votre parcours professionnel ?
Christine DUTRIEUX : Je suis assistante sociale de formation. Je suis entrée en 1987 à l’hôpital de Jolimont. En 2004, la direction m’a sollicitée afin de lancer la fonction de Médiation. J’ai relevé le défi et créé le cadre du service. En 2006, j’ai stoppé mes activités d’assistante sociale pour devenir médiatrice à temps plein pour les hôpitaux de Jolimont, Lobbes, Nivelles et Tubize. Depuis 2 ans, et le regroupement avec les hôpitaux de Mons et Warquignies, j’ai la chance de travailler avec Julie sur différents projets en vue d’uniformiser la Médiation Hospitalière et la rendre plus efficace pour nos patients.
Julie VANDERELST : J’ai débuté en 1999 à la Clinique Saint-Joseph en tant qu’assistante administrative au sein d’un secrétariat médical. 15 ans plus tard, j’ai souhaité me réorienter et on m’a proposé la place de médiatrice. J’ai suivi une formation en médiation civile et commerciale et j’ai obtenu mon agrément par la Commission fédérale de médiation. A l’époque, le service s’appelait « Médiation des Plaintes » ce qui avait une connotation assez négative. J’ai cependant très vite pris conscience du côté positif de la fonction, nous aidons le patient et le prestataire de soins à trouver une solution à leur problème. J’apprécie beaucoup cet aspect de mon métier.
Quelles sont les qualités essentielles au métier de Médiateur ?
Julie VANDERELST : Une grande capacité d’écoute. Généralement, le patient qui nous arrive ne trouve pas d’interlocuteur et ne sait pas à qui s’adresser. Le fait qu’il soit entendu et que son problème trouve un écho est déjà un grand soulagement pour lui. Certains patients veulent juste relayer une situation vécue sans forcément attendre de retour.
Christine DUTRIEUX : Faire preuve d’empathie est aussi très important. Nous devons accueillir les émotions des personnes qui nous contactent, mais aussi maîtriser nos propres émotions. Nous traitons des soucis liés à la santé, ce qui peut représenter une charge émotionnelle lourde. Nous devons souvent prendre du recul afin de rester objectives et professionnelles. Aujourd’hui, le service de Médiation est reconnu au sein de nos hôpitaux. Il arrive également que nous soyons contactées par le personnel soignant qui cherche des conseils afin de désamorcer une situation compliquée avec le patient ou ses proches.
Julie VANDERELST : Nous avons effectivement une mission de prévention. Nous anticipons les éventuels conflits. Les soignants peuvent nous solliciter dans ce cadre.
Vous avez également un devoir de neutralité...
Christine DUTRIEUX : L’indépendance du médiateur est une qualité essentielle, pour le patient. Cette indépendance garantit au médiateur la confiance des parties. Nous devons faire preuve de neutralité et de confidentialité.
Julie VANDERELST : Tout est très clair et bien établi à ce niveau-là avec les différentes directions hospitalières. Nous pouvons travailler librement et en toute autonomie.
Y a-t-il une situation qui vous a marqué durant votre carrière ?
Julie VANDERELST : On ne sait jamais comment une médiation va aboutir. Le processus dépend essentiellement de la bonne volonté des parties. Je me souviens d’une patiente mécontente suite à une intervention chirurgicale bariatrique, liée à l’obésité. La patiente avait coupé tout contact avec le chirurgien. Après discussion, elle a finalement accepté en ma présence et celle de son mari de rencontrer le chirurgien. Je n’étais pas optimiste quant au bon déroulement de cette médiation vu l’affect important de la patiente. La médiation a cependant permis de renouer un dialogue et une solution s’est rapidement dégagée au cours de la médiation. La patiente a même souhaité être examinée durant la médiation par le médecin !
Christine DUTRIEUX : Notre travail est imprévisible. C’est au moment de la rencontre avec le patient que la « magie » peut opérer et que les choses peuvent être expliquées et s’apaiser. Nous avons la chance de ne jamais tomber dans une certaine routine. Quand la médiation est réussie, chacun en ressort gagnant.
Julie VANDERELST : Les patients ont parfois une attente importante en termes de résultat et perdent de vue que le médecin a une obligation de moyens et non de résultat. Des complications peuvent également survenir sans pour autant qu’il y ait un manquement à reprocher au médecin. C’est toute la difficulté de faire alors la part des choses entre un aléa thérapeutique et une erreur médicale, et de faire comprendre que tout acte médical, même réalisé dans les conditions de compétence et de sécurité conformes aux données actuelles de la science, revêt un risque de complication. C’est par exemple le cas pour des infections post opératoires. Le médecin a là un rôle important à jouer dans l’explication de ces éventuelles complications.
Christine DUTRIEUX : Dans ce cadre, l’enjeu est de s’assurer que le patient a bien compris la situation et tous les éléments à prendre en considération. Si les explications apportées au cours de la médiation ne satisfont pas le patient, nous pouvons le guider vers d’autres alternatives comme un service juridique de mutualité, un service d’avocat, l’ordre des médecins, ou encore le Fonds des accidents médicaux…
Qu’est-ce qui vous motive au quotidien dans votre travail ?
Julie VANDERELST - Christine DUTRIEUX : C’est l’aide que l’on peut apporter au patient, à toute personne qui nous interpelle. Nous donnons le maximum, à travers le dialogue, pour aider les parties à trouver une solution. C’est très motivant de recevoir des remerciements de patients et la reconnaissance des prestataires de soins.